06 août 2017

Ashes

en écoutant Ashes


La volupté du magma
S'écoule en arpège
Par des fontaines saoules
Aux tonalités souterraines
Des saisons d'émotions
D'obscurité première enrichie
Ô les amoureux de l'acier

Elle laissera sûrement sa mémoire
Puiser hors ses muses
Nos impuissances lasses et usées
Dans des braises accueillantes
Congelées pour novembre

Quand l'espoir deviendra opaque
Fossile de glace balsamique
Quand nous ne pourrons plus que souffler
Le coeur étourdi de viser
Les environs du creux de nos mains

Pour se souvenir de sa chaleur
De ses notes diffuses emmitouflées
Cachées sous des protections
Et des protections
De pure et tendre laine

Mais la découvrir, au soleil puissant d'août
Seul capable de cristalliser
Lentement
Nos âmes explosées sur la grève,
C'était le présage

Alors, la cornée irradiée
On écoutera la terre
Rassasiée de ses cendres
Persuader les pupilles
De nos yeux enfermés
Que, par l'hiver assassin
Nous ne voyagerons pas seuls

Soutenus sous ses voiles
A veiller les heures sombres
Aux lueurs de sa voix
Debout, chancelants
Dans les vents contraires
Nous irons ravivés
Par les brumes, par les flammes
Evidence d'ivoire
De ses rythmes d'ébène

03 août 2017

Dites, Mister King...

Défi d'écriture de Juillet sur Babélio
Depuis que j'ai accepté l'invitation officielle, et déterminée, des services de police,
qui m'enjoignaient d'effectuer sans plus tarder une visite guidée de leurs locaux,
je dois bien dire que j'y passe le plus clair de mon temps à répéter la même
histoire. Et j'ai beau la semer dans une foule d'oreilles plus ou moins, propres,
gradées et, plutôt moins que plus, accueillantes, je reçois toujours à peu près la
même réponse :
- Vous ne seriez pas en train de vous foutre copieusement de ma gueule, par
hasard ?
Mais, je n'ose toujours pas leur avouer que, si le hasard a bien un rôle à jouer
dans l'enchaînement des multiples péripéties qui m'ont amenées devant eux, ce
n'est certainement pas à ce niveau-là, où le doute n'est pas de mise. Ah ! Qui n'a
jamais eu l'audace de prétendre percer le secret de la recette magique, qui
permettrait, sans coup férir, d'amadouer le fonctionnaire emmitouflé dans la
spirale infini de son vortex de certitudes ? Oui, je l'ai eu, moi aussi ; je ne l'ai plus.
Plus du tout…
Et, si l'on devait rester dans le domaine du foutre, la seule direction qu'une boule
dans la gorge m'empêche de suivre en hurlant, serait celle d'une paix qui semble
les avoir quittés depuis trop longtemps.
Non, parce que je veux bien être gentil, patient, accommodant au possible, je
crois qu'on peut tous s'accorder là-dessus sans chipoter : ils sont un brin obtus,
dans les brigades, n'est-ce pas ?
Heureusement, j'ai fait l'acquisition, par une pratique régulière, d'un grand sens
de la maîtrise de l'art de communiquer, de consolider le lien avec l'autre, par une
écoute silencieuse autant qu'active, une reformulation apaisante, la respiration
profonde, etc.
- merci de bien vouloir me joindre en mp pour confirmation des places disponibles
lors de mon prochain séminaire -
Bref, je veux que ce soit bien clair, pour eux, comme pour le reste de l'humanité :
je suis avec vous, stupéfié comme vous, dans un mélange d'incrédulité et de
refus de ces prétendues évidences qui n'ont de cesse de remettre en cause les
fondements même de toute construction cartésienne qui soutiennent notre vision
du monde.
Et, avec vous, je ne peux que m'exclamer :
- Non, mais j'hallucine ou quoi ?
Que dire des raisons qui nous ont poussées, Jules et moi, à refuser de prendre
nos congés en août, tout ça pour passer des journées interminables dans les
bureaux vides d'une société moribonde ? La peur d'être viré en rentrant de
vacances ? Même pas. D'ailleurs, avons-nous vraiment refusé quoi que ce soit ?
Nous, on a fait comme d'hab', on a laissé couler les jours, les uns après les
autres, et le temps venu, il nous fût simplement impossible de nier le résultat de
notre légèreté : nous n'avions rien posé et furent d'office désignés comme
"présence minimum" au cas où tomberait d'on ne sait où, un de ces improbables
contrats que se devrait de déshonorer sur-le-champ tout personne tant soit peu
raisonnable.
- Donc, je résume, vous et votre acolyte, le dénommé Jules, vous désertez de
votre poste de travail le mercredi 2 août 2017 à 18h02, pour aller au bistrot du
coin. Et, là, vous tombez sur Steve McQueen ?
- Non, Stephen King.
- Ne jouez pas sur les mots, mon petit bonhomme !
- ...
On ne devrait jamais rencontrer ses idoles ; je vous le dis tout net, à tous, génie
littéraires, musicaux, etc. Restez chez vous, tranquilles. Faites vos trucs géniaux,
dans votre coin, et, ci-fait, livrez-nous le résultat de ces activités mystérieuses,
aux dates contractuelles dûment validées par vos soins ; nous serons quittes.
Non, parce que là, voir M. King au comptoir, comme n'importe quel quidam,
occupé à faire des ronds humides avec le cul de son demi, j'avoue, là, on a pété
un câble. Je crois qu'on aurait mieux supporté ça si on l'avait croisé au rayon
quincaillerie de l'Hyper, en pleine zone industrielle de banlieue. Je dis ça dans
l'absolu, car j'y vais jamais, en banlieue. Et puis, faut aussi considérer le contenu
hypothétique de son caddy. Non, un génie, ça pousse pas un caddy, au secours !
Ça perd pas non plus son temps au bistrot, comme un con de contribuable…
- C'était son idée, à Jules.
- Mais putain, vous avez fait quoi du corps ?
Les flics, ça imagine toujours le pire. Donc, forcément, le pire se produisant
parfois, il leur arrive d'avoir raison. Mais de là à choper le melon, à se la péter, à
croire qu'ils ont tout compris, faudrait pas pousser… Vous ne rêveriez pas, vous,
de posséder un talent quelconque ? Et comment ils font, les scientifiques, pour
discerner les différences entre les espèces, parce que, entre un génie et moi, on
va pas se le cacher, on n'est pas sur la même branche de l'évolution. Ben, c'est
ça, ils dissèquent. Mais, je vous rassure, on n'est pas des monstres, au début, on
a essayé de causer. Mais, vous l'aurez deviné, le gars, sans son traducteur, c'était
du chinois.
- You want me to… What ?
Stephen, Stephen, Stephen, pour un génie de l'horreur, je dois bien avouer que tu
ne saisi pas bien l'ampleur de la problématique qui nous habite. On n'en peut
plus, nous, de nos vies de merde. On veut être comme toi, libéré du quotidien,
des petits chefs, des N+1, des flics, de la routine, de la mort, du manque. On veut
percer le mystère de ta réussite, tu comprends ?
- Oh shit ! Get a life !
Ce que nous fîmes, mon adjudant, ce que nous fîmes...