31 juillet 2017

Crépuscule, respiration entre deux mondes

Forum Babélio.com

- Du coup, on peut dire que t'es au crépuscule de ta vie !
J'ai bien conscience, les fréquentant depuis une bonne dizaine d'années, que, dans les vestiaires d'un club de boxe, et ça, finalement, comme depuis n'importe quel endroit de notre chère planète, il faut être prêt à entendre tout et n'importe quoi ; de la vérité la plus nue et étincelante, jusqu'aux pires absurdités malsaines.
Alors, comme trop souvent, abandonnant mon attirance première pour la raison, qui ne m'a jamais rien apporté de bon, je note scrupuleusement le nom du garçon dans ce qui me reste de neurones, car, non, le sport, nul ne le pratique pour son pseudo bénéfice santé, et me promets, si je dois au final tout oublier, de lui réserver un chien de ma chienne, à ce maudit poète des douches publiques.
A mon débit, il faut quand même dire que, cette année, j'ai passé le plus clair de mon temps à tenter de partager cette incompréhensible, et, si prévisible, durée, qu'un anniversaire insolent s'est finalement pris un sacré plaisir à scrupuleusement valider ; et j'ai reçu toutes les réponses possibles, sans qu'aucune ne me paraisse vraiment susceptible de véhiculer le moindre intérêt, ou, pour le moins, je m'en rends compte maintenant, de résonner avec quelques de mes attentes.
Ah, ça, quand on ne veut rien entendre, il y a de fortes chances pour que l'on n'entende rien...
C'est vrai que j'attendais autre chose ; comme ce petit gars qui rentre en sixième et qui voudrait bien que sa mère lui cause de la mort, mais, qui ne reçoit en retour que de petits sourires gênés, dans un savant mélange de sentiments partagés :
- Oh, qu'il est mignon
- Mon dieu, qui m'a foutu cette graine de psychopathe dans les entrailles ?
- Mais qu'il la fasse, sa crise existentielle et qu'on n'en parle plus, plus jamais, seigneur...

Nous vivons tous sous le terrible règne de la désynchronisation ; quand le jeune voudrait saisir la profondeur du  crépuscule, le vieux, lui, serait plus immédiatement intéressé par l'éclat des lumières de l'aube. Mais, ces deux temps ne sont vécus que par les poètes, que nous faisons tout pour soigneusement museler sous des couches d'occupations très importantes.
Je me relève doucement de ma table de travail, fait craquer quelques cartilages, usés par de trop violentes sollicitations, fatigués par toutes ces années irrécupérables, avec, au coeur de mes pensées les plus profondes, la plus triviale, la plus merveilleuse et la plus pathétique des inventions humaines, la solution ultime, la vraie pierre philosophale : la couche !
Elle absorbe tout ce que nous voulons supprimer, ce que, malgré nous, nos journées laborieuses ont laissé suinter, elle amortit l'angoisse de la nuit qui vient, de son incomparable douceur protectrice, et, elle devient, dans un paradoxal dédoublement, en même temps le sauveur, en même temps l'oppresseur. Elle est assurance, protection, foyer, verrou, parachute, airbag sophistiqué, technologie portable avec capteurs connectés, l'Alpha et l'Oméga. Nous lui devons la Paix et nous lui dédions, en retour, les plus belles et les plus conséquentes parties de nos vies, pour se l'offrir, ce temps qui ne nous appartient pas et qui n'existe, comme chacun sait, qu'en fonction de cette putain de pesanteur, voire, de cette satanée vitesse.
Alors, halluciné par la beauté transitoire, hypnotisé par ces doux dégradés, silhouettes évanescentes, formes et paysages dilués dans l'espace, quand le temps joue avec les lumières du soir, j'ai raté l'essentiel, j'ai raté le zénith, ce point d'entrée vers l'infini, ce moment de bascule, pic acéré où n'existe plus ni avant, ni après.
Mais, je campe toujours aux alentours, en guetteur patient, libéré du jour qui disparaît, de la nuit qui vient, prêt à m'abreuver à cette tête d'épingle temporelle, comme on met un pied dans la porte. Pour, enfin, plus que vivant, pouvoir laisser le temps poursuivre sa route, balayé de tout ce qui est. Je serai de ce qui n'est pas, qui n'a jamais été, enfin, qui n'existe pas, qui n'a jamais commencé, et n'aura jamais de fin.
Le cœur du crépuscule,
La pointe parfaite de l'aube,
Le plein midi solaire,
L'entre deux respirations du monde
Parlent en vers
Écoute

11 juillet 2017

Au gré du Vent


(si vous trouvez ce texte inspiré de "Appelez-moi par mes vrais noms
de Thich Nhat Hanh, c'est vrai, sinon, cliquez sur le 1er lien)

S'il vous plaît, soyez
Tout simplement,
Justes
En me nommant

Si vous me dites bon et bienveillant
Vous me jugez et m'amputez

Sentez ma Vie souffler
Sans aucune frontière
Et déborder, continuellement
Des pores de mon histoire
En circonstances et facettes
Aux couleurs et lumières infinies

Si vos yeux me découpent
Dans l'obscurité de l'instant
Je ne serai que l'ombre d'un temps
Une cicatrice horizontale
Cristallisant toute beauté
Dans sa fragile prison ambrée

S'il vous plaît, aidez-moi
Que je puisse répondre à tous
Que je puisse être
Plein et entier

Car, j'ai tous les noms
Ici victime et là bourreau
Au gré du Vent
Dont nul ne sait
Ni d'où il vient
Ni où il va

01 juillet 2017

Encre Tempête

au Festival Chahut


Encre tempête
Lève les gens
Je verrai bien
Ce qui m'attend

Place Saint Michel, saint mélangé
Et tes révoltes élémentaires
Quand sous le vent rêvent les vers
Pour les deux chanteuses en colère

Vois mes écrits, fais qu'ils s'envolent
Ou qu'ils rasent motte sur le sol
Je m'en fous car je vous y ai vue
En pleine naissance reportée
Belle marathonienne épuisée
Âme solitaire déracinée

C'est que, avide de m'exhiber
J'avais achevé ma pitié
Et ton temps, volé
Et ta joie, ta paix, cassés
Sous les pavés, cachés
Oui, je n'ai rien fait pour t'aider

Et, pire, je l'ai levée, cette armée
Aux puissants rayons tannants
De nos étés nucléaires
Et fais fondre ces folles rafales
Raffolant de tes protections
Pour jusqu'au soir, te harceler

J'étais NOUS, le public
Étais-tu nue, de face
Simplement lasse
D'une autre moitié, d'un profil ?

Moi, je voulais qu'on m'affiche
Mes tripes bouillaient de sang et de bile
Premier né gémissant
"Choisissez-moi, écoutez-moi"
J'avais deux sous de sourire seul et triste
J'étais poche !

Mais vos voix savaient le secret :
Ces mots étrangers, c'étaient les miens
Et, ce qui disait le mieux ma vie
C'étaient ces autres,
Plus moi que moi,
Parfaits et inconnus
Mes milles moi

Alors, enfin, je pus rentrer
J'avais parlé
Sans mot dire