23 septembre 2017

Carole K.


Projets collectifs audiofanzine


Salut, bon, on va faire les choses dans l'ordre, commencer par le commencement, c'est le passage obligé, désolé, c'est l'heure des présentations. Alors, moi, c'est petit Tony. Enfin, c'est comme ça que tout le monde m'appelle.
Mais, en vrai,  je suis pas si petit que ça. Et puis, va chier, j'en ai pas besoin de ta compassion. Car, même si tu trouves que le début de mon histoire est banale à pleurer, attends un peu de voir la suite.
En fait, là, intérieurement (mais tu peux pas l'entendre, heu, tu m'entends ?) là, quoi, je me marre. Parce que, malgré les plombes que je me cogne sur ce quai, à me demander où est Carole, je sais qu'elle finira par arriver. Depuis que je la connais, elle finit toujours par arriver. Ce genre de femmes, on les attend jamais trop longtemps. Elle le sait, et je sais qu'elle sait que je le sais. Sonc y'a donc de fortes chances pour qu'elle continue de prendre son temps, comme il vient, ou pire, la garce, je l'aime mais elle abuse, à faire tout le temps comme si le temps lui appartenait, rien qu'à elle.
Mais qu'est-ce qu'elle fout ?
Pour le moment, je me concentre sur l'instant où mes phares découvriront enfin sa silhouette. 10 contre un qu'ils s'évanouiront instantanément, tous les doutes, les frustrations et agacements due son retard si prévisible.
Alors bon, si elle flippe un peu, en me voyant lourdement armé, je prends !
Et si elle a un léger relent, en découvrant le type, là, que j'ai stocké dans la malle arrière et qui fait sa dernière sieste, comme un con en chien de fusil, j'avoue que ça serait la cerise sur le gâteau.
C'est que j'ai beau savoir qu'elle s'en tape, de tout ce qu'on pense, de cette nuit, qui passera pas l'éternité à nous protéger, de tout, en fait, elle s'en fout de tout pour n'en faire qu'à sa tête, et bien,  c'est pas une raison suffisante pour m'empêcher de jouer au héro.
Putain, personne ne le sait encore, mais c'est ce que je suis, un héro, né pour gagner, premier à l'arrivé, la belle brune pendue à mon coup, les lauriers d'audiofanzine pour ce voice over de débile mental, je sais pas, un truc, un trophée… Je peux pas finir comme ça. Le film est noir, ok, mais le jour, il finira bien par se lever ?
Sérieusement, il s'en faudrait pas de beaucoup…
Elle ramène son beau petit cul, on balance la voiture, avec flingues et passager, dans l'eau glauque du port, je gagne la saison 16 des compos inspirées et c'est salut la compagnie, hasta la vista, je disparais sans demander mon reste.
Et surtout, j'arrête de me plaindre. Plus jamais de "Bonsoir m'sieur dames", je remballe tout l'attirail et vous me verrez plus traîner dans le coin.
Plus jamais, j'te dis !
Allez Carole, c'est quand même pas sorcier...
Tu passes chez Mario, tu prends la sacoche pleine d'oseille et tu ramènes ta fraise.
Je vois ce que tu te dis, toi qui m'écoute, qu'elle viendra pas, qu'elle est trop belle pour moi, que c'est déjà écrit dans les codes de la série noire, que le mec est seul sur la photo et qu'il va le rester, que de toutes façon, trop bon trop con, j'avais perdu d'avance ?
Tu crois vraiment que je vais leur permettre, aux choses, d'être aussi simples ? J'ai comme l'impression que t'as oublié les rebondissements, les fausses pistes, chausse-trappes inhérentes au genre. Tu sais, toutes les astuces scénaristiques pour bien te mener en bateau. Pour que t'oublies jamais que dans la réalité, tu seras jamais le boss.
Et moi non plus...
Bon, si t'es malin, t'auras compris le truc...
En tout cas, t'as pas dû oublier l'essentiel, un bon standard, ça tourne autour des 3 minutes.
Alors, regarde ton compteur et souhaite moi bonne chance.
Et, si tu veux vraiment savoir la suite, rendez-vous pour la saison 17 !

05 septembre 2017

Porte numéro un



J'ai claqué la porte un peu trop fort. Le geste était souple, me semblait maîtrisé. Mais c'est peut-être du côté de l'amplitude, de l'intention, qu'un certain décalage s'est produit, entre ma volonté de marquer le coup et la violence du bruit résultant. On peut toujours se trouver des excuses. Je pourrais parler de la sensibilité exagéré de certain face aux sons du quotidien, pas toujours bien égalisés ; le quotidien est comme ça, qu'y puis-je, pourrais-je rajouter sans sourciller. Ou mettre en cause toute la chaîne des métiers du bâtiment car, en  y regardant de plus près, toutes ces économies de matériaux, ces chambranles en pins des Landes, ces cloisons en plâtre, ça supporte mal l'assaisonnement hormonal susceptible d'être distillé par tout bonhomme normalement constitué.
Mais les faits sont là, cette porte fut, par mes soins, copieusement claquée. Et un bébé se mit à pleurer, un chien, au loin, à aboyer. Et cette sirène de police, aux frontières de nos horizons sonores, qui me fit douter un instant du bien fondé du hasard, du moins, sous cette forme de pompon magique du béret de marin.
Je me ramifie, c'est peu de le dire… Et toi, tu fais quoi ? Encore en train de sauver le monde ? Tu fais bien.
Moi ? Je regarde monter l'envie. Elle est morne et triste, arrive à coup sûr du fin fond des abysses. Elle se prétend mathématique mais, fait taire les nombres imaginaires. Elle théorise sur tout, sans rêve ni utopie. En fait, comme dirait Denis, le petit dernier de la voisine affamée, elle est à chier.
Alors, avec ce qui me reste d'une folle lucidité en phase terminale, complètement étiolée, je te livre ici mes doutes.
Fallait-il ou ne fallait-il pas la claquer, cette porte ?
Faire tressaillir le papillon universel.

Certain s'oublient sur des paillassons.
D'autres oublient la force de ton sourire.
Le reste oublie qu'ils ont un jour souri.
Moi, je n'oublie rien.

04 septembre 2017

All Pompeii's Parties

maj 19/09/2017 (sound added)




Elle a vu à ses pieds
Gronder torrents de pierre
Et cris mélangés

Tous se terrent
Quand le sol est au ciel
Et avale la matière

Les poumons bleus
Que l'huile de roche racle
Ils paniquent

Je courais dans un rêve
Par grands bonds affairé
Mais n'allais nulle part

Soumis assez au flux
D'une rivière morte et pleine
De croches-rampants tristes

Vétérans agonisants
Marchands sourds
Coffres blindés

Ce brouillard quotidien
Ces cornées opaques
Inséparable misère

Quelques fouets claquaient
Le son de sa voix ?
J'avançais, à ce jour, un peu

La lumière, on s'en rappelle
Les lèvres aujourd'hui sèches
Allait et venait, librement

Qui guette encore
Quand les cœurs se souillent
Et vomissent sans voir ?

Sa silhouette sombre
Coiffée de flammes blanches
Reste dressée 

Comme arrivent les phares
Bravant les éboulis
Elle flambe

Tout autour est détruit
Verticale dans la nuit
Elle danse


02 septembre 2017

Meta Incognita

Café littéraire



Nous sommes désormais des fugitifs. Les oreillers, le confort, les fleurs, les papamamans, c'est fini. Les bisous, les bonnes journée ma chérie, finalement, tant que les copines regardaient pas, c'était chouette ; mais ça aussi, c'est fini. Ma robe foutue, y'a moyen que je la garde encore longtemps sur les fesses. Fait chier, Zara, va falloir oublier.
Et, bien sûr, j'ai rien vu venir. Bon, avant, je dis pas que c'était le paradis, on avait toutes et tous nos soucis. Surtout quand… Ils... Enfin, je...
Non, je regarde les ruines autour de moi et, vraiment, les tracas de mon ancienne vie, si ce qui nous est tombé dessus, on peut appeler ça une nouvelle vie, mais quand même, et désolée si ça fait vieille conne, mais avant, c'était pas loin d'être parfait.
Je repense à Théo, à nos bézouilles tranquillottes, les après-midi de libre, quand il faisait tellement beau que tout le monde sur ruait dans les parcs. Je m'en foutais, moi, de prendre le soleil, un seul de ses rayons voyeurs, tout doux et tout chaud, qui passait entre les volets mal tirés, ça me suffisait, surtout que j'avais autre chose à prendre.
C'était peut-être tout simplement le moment. On s'était bien régalés, on avait bien fait n'importe quoi, on avait frôlé tellement de drames, que celui-là, fallait pas croire qu'on allait y passer à travers, l'air de rien. Un café, l'addition, c'est pour moi. Même si j'ai rien pour payer. La gueule de la banquière, quand je défonçais mon découvert. Et là, toutes les banques coulées, alors, quelle gueule elle peut bien avoir, maintenant, la banquière ? J'aime bien, ce don que j'ai, les deux pieds dans la merde, de toujours trouver quelqu'un de plus en vrac que moi, pour pouvoir lui en mettre plein la tronche.
Yep, mon côté bitchy continue de me sauver la mise. On a beau rien y voir la nuit, centrales en fumée, attentats bien pourris, je me réveille toujours dans un appartement inconnu, jamais dans la rue. Combien j'en ai vue, des princesses déchirées, finir à moitié à poil, coincées entre deux poubelles ? Alors, quand l'ombre des tours s'allonge, moi, je me bouge le cul pour trouver un nouvel endroit, que personne n'ait encore visité. Les mecs sont des porcs, dès qu'ils squattent quelque part, ils contaminent tout ce qu'ils touchent, objets, vivants ou pas, tout fini bon à jeter. D'un simple regard gluant, ils ont beau tout dégueulasser, je prends quand même bien soin d'en avoir toujours un sous la main, ça peut servir. Faut juste savoir partir à temps, quand ils ronflent encore, en rêvant d'un dernier arbre à scier, un ruisseau dans lequel pisser, je sais pas, je suis pas dans leur tête ?
À quoi ça peut rêver, un mec ? Un empire à bâtir ? Ben, là, ils sont servis, y'a du boulot… Faut voir le chantier qu'ils ont laissés… J'ai jamais voté mais j'avais bien ma petite idée, pour rétablir la paix. C'était pas des bombes, qu'il fallait envoyer, c'était des bombasses. Et fini les attentats suicides, on leur aurait fait des attentats sucides. Mais non, c'était toujours qui aurait la plus grosse. Et maintenant, avec le reste de l'humanité, savamment stérilisée, on est bien content de simplement être capable de voir un nouveau jour se lever. Rien n'a changé, on en profite, encore et toujours, même sachant que le nombre d'appartement à découvrir, un de ces jours, ça sera zéro.
Moi, pour cette nuit, je suis au chaud.

01 septembre 2017

Oui, mon corps t'écrase

Oui, mon corps t'écrase
Te retient immobile
Laisse le vent frais du matin
Tout emporter
Tout sauf nous
Sous la couette réfugiés

Une nouvelle rentrée
Un instant qui passe
Comme un train raté
Un réveil ignoré

J'ai rapproché mes lèvres de ton oreille
Et la douceur énorme
Et le souffle minuscule
Tout frissonne, tout murmure
On s'entend bien, Chut !

Et mon corps t'écrase
Nous rêvons
D'abandon, de défaite
Traversons l'éther
Loin, si loin
De ne rien faire
Laissons derrière
Ce qui se fait
Ou pas
Avec ou sans
Nous

Nos nuit
Elles seules savent
Les sentiers cachés
Les routes imaginaires
Elle inventent, libèrent
Réinventent et déshabillent
Nos âmes lasses
Regarde les sourire