30 décembre 2016

Pierrot, tu penses trop !


Tu penses trop, mon Pierrot.
De jour comme de nuit, tu penses trop.
Le jour, tu oublies l'essentiel :
  • Les belles assiettes,
    À mettre sous les viandes, les légumes, les desserts
  • La taille du plaisir, et celui qu'on partage entre amis 
  • Les parures des nos lits et celles pour en sortir 
  • Celle-là, seule raison, pour un jour s'en sortir
  • Les heures échangées, contre un peu de monnaie
  • Tout ces gens à convaincre,
    Qu'ils seraient bien inspirés de te l'accorder, ce petit plus d'attention délicate.
  • Et les guerres, les famines.
  • Et les proches, les lointains
En gros, tu oublies,
Combien ta vie serait parfaite
S'il ne te manquait, ce fabuleux empire,
Que chacun t'encourage à bâtir
Aux frontières invisibles
De nos terres occupées

Mais comment sauraient-ils, que, pour toi, rien n'est tout à fait invisible ?

L'invisible, il attend, caché, derrière les choses, nommées, répertoriées.
Il attend :
  • Soit qu'on le nomme lui aussi,
    Si l'on se sent un peu perdu, 
  • Soit qu'on ne le nomme pas,
    Quand nous suffit de savoir qu'il est là.

En attendant de le trouver
Le nom parfait et unique
De toutes les choses à découvrir
Celui qui apaise, celui qui rassemble
Celui qui nous tire
De ces maudits songes anxieux ;
Tu choisis le voyage
Au Royaume Infini
Des Choses Inconnues.

Et, bientôt, vient la nuit
Mais c'est une autre histoire...


20 octobre 2016

Ceci n'est qu'une île


Chaque matin, au réveil redondant,
Sur une plage, aveuglé, je m'échoue

Chaque jour, le voyage tourne court
Et je rampe, au lever, embrumé, sur le sable

Quelques restes salés de la nuit sur le corps
Quelques rêves de varech aux sirènes mélangés

Tant de fantômes insensés piégés entre deux eaux
Tant d’innommables peuplent ces fonds abyssaux

Devant moi, si j’arrive à m'y traîner, par delà ce désert
La promesse d’un refuge, d’une jungle vivace

Que sous les futées s’apaise enfin ce soleil implacable
Qui ne sait que brûler, se plait à m'écraser

Et tous les jours je revis cette fable
Le même échouage, le même refuge
L’eau, le sel, le feu et l’ombre
Dans cet ordre, imperturbable

Car mes journées sont des îles 
Au milieu de nulle part, encerclées
De tous côtés, des ténèbres font la ronde
Gardes-côtes aimables
Elles attirent, Elles repoussent
En tous sens, nous occupent

Alors, on se dit qu’il nous reste le ciel
Alors, on construit, pour l’espace, un vaisseau

Mais que l'infini est amer 
Et ce vide à l'entour...

Comme si la vie au grand jour, 
Comme si la veille sur la Terre,
Tout ceci n'était qu'une île
n’erreraient hagards 
Que de las naufragés


05 septembre 2016

Gravité 1

photo de The Expanse

Cette fois-ci, franchement, nous n'aurions rien pu faire. C'est arrivé petit à petit, insidieusement, sans aucun signes avant-coureurs.
Certain corps de métiers, malgré tout, voulurent lancer l'alerte. Mais la chose, tellement peu probable, ne fut pas entendue. Un pèse-personne qui se dérègle, c'est monnaie courante, quand l'affichage diffère par trop de l'expérience sensible. Alors, pour une fois que l'erreur était en faveur de l'utilisateur, qui s'en plaindrait ? Des scores de lancer de javelot qui grimpent, ça fait se lever les foules. Les stades pleins à craquer nous faisaient oublier, pour un temps, la chape anxiogène que la politique imprimait sur le moindre de nos médias.
Au début, c'était très sympa. Planait dans l'air une légèreté qui rappelait l'enfance. Tous nos déplacements adoucis, les accidents moins graves, les caresses enfin tendres. Une lune de miel d'avec nos corps, bien qu'ils n'eussent pas changés.
N'avaient-ils pas changés ? Certain le croyaient, puisqu'une sensation se doit d'être preuve, surtout lorsqu'il s'agit de l'intime. Sinon, à qui se fier ?
Je sortais du bureau, le jour où nous avons dû regarder les choses en face ; quelque chose d'anormal était en train de se produire. J'avais fouillé dans ma poche pour en sortir un vieux paquet de gommes à mâcher. Il n'en restait que deux ou trois mais j'en étais soulagé. Car il aurait aussi bien pu être vide ; ma main droite ne sachant pas toujours ce que me donnait ma main gauche. Alors, avant même de le prendre en bouche, j'en sentais la fraicheur me fouetter le palais, irradiant en ondes de plaisir jusque derrière mes oreilles.
La réalité, fidèle à son habitude, fut un peu en deçà de mes espérances, mais resta agréable, tout de même. Et puis, c'est en mâchant qu'on fait naitre le plaisir. Je me préparais donc un bon trajet de machouillage jusqu'à chez nous. Il ne me restait qu'une épreuve ; viser correctement la poubelle de rue, pour y jeter la minuscule feuille d’emballage de ma friandise. Ce qui ne se fait pas sans une astucieuse préparation, comme celle de confectionner une petite boule, pour gagner en pénétration de l'air. Minimiser au maximum le coefficient de traînée Cx = 2 F /(S . M .V²) est un art à part entière dans lequel je me flatte d’exceller.
La propulsion aussi, a son rôle à jouer. Mais il est loin, ici, de ne s'agir que de puissance. Ce qui serait, pour vrai, tout à fait vulgaire. Le geste se doit d'être sûr, efficace ; rien de plus ridicule que de n'engendrer qu'une poussive poussée. Mais il doit en même posséder certaine caractéristiques esthétiques, telles que la discrétion, la grâce, voire l'incongruité. 
Personnellement, j'encourage la technique dite de la "bille de l'air" ; la boulette est maintenue, sans trop de pression pour ne pas l'écraser, ce qui aurait comme conséquence fâcheuse de massacrer ainsi son faible Cx (voir définition plus haut), entre le pouce et le majeur, les autres doigts restant élégamment tendus en direction de la cible, symbolisant ici ce que nous appellerons dorénavant, la visée.
Aucun athlète ne peut, à priori, garantir la perfection de son geste mais j’eus la faiblesse de penser, qu'en cette heure, ma performance la frôlait joliment.
La boulette me fit somptueusement mentir ; elle n’atteignit jamais son objectif. 
Sa trajectoire molle snoba la poubelle pour continuer calmement sa course, par delà la route, quittant, au final, et après qui peut savoir combien de temps, mon champs, troublé, de vision, sans jamais avoir touché le sol.
J'en restais cois, pas fier pour un sous, en contemplant la main vide d'où elle s'était élancée.
Trop conscient qu'elle seule n'aurait pu créer ce prodige.  

(à suivre...)

01 août 2016

L’atome, ça tombe à pic.


Sandy Skoglund - clic 
Mil et une (atelier d'écriture)
LE MOT A PLACER EST : ETCETERA
Nous avons clairement pris des risques.
L'idée était de trouver une source d'énergie inépuisable.
Comme dans le mythe de je-sais-plus-qui, ne plus dépendre des aléas de la nature. Le contrôle absolu, quoi. Au début, ça faisait sens. Le pétrole polluait plus qu'on ne pouvait le supporter et il était sous la coupe de puissances potentiellement belliqueuses ; surtout compte tenu de leurs désirs de revanche (vu ce qu'on leur avait mis par le passé...)

Bref, l’atome tombait à pic.

On courait tous comme des abrutis, sans vraiment se préoccuper des conséquences de nos choix. Personne n'aurait osé l’affirmer publiquement, mais nous avions clairement fait acte de Foi envers la Science. La décontamination du stockage...?
- J'affirme avec confiance, je crois fermement, j'ai une Foi totale dans le fait que, un jour, la science trouvera une solution claire, sûre et définitive. Nous l’appelons l'Avènement, pour vous dire.
Et pour l'instant, prions. Que rien ne nous pète à la gueule.

Bon, ça a pété.
Et plusieurs fois.
Et une, et deux, et trois,
Et cetera.

Certes, il ne serait pas juste de dire que nous n'avons pas assez prié. Honnêtement, nous n'avons pas prié, du tout. Parce que, si la Science était devenue notre religion, il n'était pas question d'en garder tous les aspects chelous. Enfin, les aspects non scientifiques. C'était plus une fascination, à bien y réfléchir.
Et puis, nous n'avions clairement pas le temps pour ces conneries.
La solution la plus efficiente, nous l'avions vite trouvée, le couple parfait : Production/Distraction.
Alors, que ça pète ou que ça ne pète pas, c'était vraiment ni de notre ressort, ni dans nos préoccupations.

Bon, ça a pété.
Et plusieurs fois.
Et une, et deux, et trois,
Et cetera.

C'est fou, ça, je n'arrive plus à me rappeler du nombre d'accident nucléaires. L'ai-je jamais su ?
On pense que la fin est arrivée, et puis non.
On voit l'humanité perdue, et puis non. Ça repart, sans que l'on se pose trop de questions, surtout celle-là :
- Qu'est-ce qui repart ?
Pas le temps, je vous dis. Il fallait reconstruire, penser les blessures, enterrer les morts, enterrer les choses, beaucoup de chouette boulot. Et alors, pour occuper, ça occupait. J'avoue qu'on méprisait pas mal les oiseaux de malheur, ces tristes charognards qui susurraient à nos oreilles :

Bon, ça a pété.
Et plusieurs fois.
Et une, et deux, et trois,
Et cetera.

Pour chanter, ça, y'avait du monde. Mais pour faire avancer l'humanité, c'était à nous de nous coltiner tout le travail. Eux, ils étaient gris, tristes, ne pensant qu'à leur vénération pour la nature, la décroissance (sic!) et pour leurs chats. D'après ce qu'on en disait dans les médias, ils adoraient les chats, ils en avaient plein. On prétendait même que c'était les seuls être à posséder une couleur, dans leurs esprits décrépis. Vert, évidement.
Bon, je suppute en me basant sur ces "visons d'artistes" qui parcourent le net. Car en fait, ils ont disparus. Après le jenesaispluscombientième accident, il n'y eu plus d'opposant au nucléaire.
Curieux, plus personne ne chantait :

Bon, ça a pété.
Et plusieurs fois.
Et une, et deux, et trois,
Et cetera.

Et plus personne de prétendre que nous avons fait le mauvais choix.
Il n'y eu plus que :
Production/Distraction/Production/Distraction/Production/Distraction/Production/Distraction/Production/Distraction/Production/Distraction/Production/Distraction/Production/Distraction/Production/Distraction/Production/Distraction/Production/Distraction/Production/Distraction/Production/Distraction/Production/Distraction/Production/Distraction/Production/Distraction/
etc.
Je faisais facilement taire la petite voix qui monte parfois, entre deux explosions. Et maintenant, je ne l'entends même plus. Si c'est pas une preuve de son inexistance.
Elle me disait, voyons, si je me souvient bien :
- Tu sais, c'est tout simple, si aucun de ces "incidents" ne peut mettre un frein définitif à l’aventure humaine, c'est tout bonnement parce qu'en fait, la Vie, ça fait bien longtemps qu'elle nous a quitté.

N'importe quoi...
Alors, pour rigoler, avec les potes, on aime bien picoler en hurlant :

«Bon, ça a pétéééééééé !

Et plusieurs fois.

Et une, et deux, et trois,

Et ceteraaaaaaaaaa !»

26 juillet 2016

Balcon, fin juillet de cette année


Rappelle-toi, le cœur, lourd, calcaire friable
Irradiant
Car depuis, il s'est tu

Rappelle-toi ses ramifications acides
Intarissables
En cette heure asséchées

Et le vent doux dans les platanes
Parfait
N'y est pour rien

Le ciel d'été, l'asile de verdure
Encerclé par la ville
Le calme, enfin,
Tout ça n'est rien

Je laisse mon regard embrasser ce qu'il veut.

D'un seul coup,
Le bleu des confins,
Le balancement vert de ces feuilles folles,
Les troncs d'arbres stoïques,
La pierre blanche entre les ramures,
Tout fait corps.

Et pourtant,
Quelque chose sourd derrière ce décors.

Nos âmes moribondes de cette fin de juillet,
Douce, ensoleillée  ;
Sont en paix,
Sans raison valable.

Elles le savaient, elles,
Bien avant le lever,
Qu'il leur faudrait s'accorder
Avec la douceur de cette fin de matinée.



29 mars 2016

Surface et profondeur d'une foule


Tu la sens, l'énergie de la foule ?
Ou n'est-ce que moi qui divague ?

Je n'oublie que rarement, qu'il le faudra, de gré ou de force, un jour ou l'autre, sortir.
Mais il me semblait bien tôt ...?
Je n'avais, en fait, prévu qu'une seule sortie, définitive, en complet de sapin.
Et tu m'as parlé.
Je déteste les foules, en vrai.
Leurs certitudes, leur violence sourde, les germes de peur qu'elles sèment, l'hystérie toute proche.
Tu m'as dit : C'est vrai, mais nous n'allons pas pour le plaisir, ni pour passer un bon moment, manifester.

J'ai senti quelques bruissements, discrètement, observé, du coin de l'œil, mes propres certitudes, qui tentaient de se cacher, se protéger, derrière des mots, qui ne valaient plus grand chose, face à toi.
Nous aurions pu parler de Gandhi, de Martin Luther King, de Thoreau, de la marche de l'Histoire.
Je n'y connais rien. À peine moi-même. Alors j'ai parlé de moi.
Qui vais-je devenir, perdu dans la foule ?
Rien ?
Autre chose ?
Nous avons souri, je crois, car, visiblement, tout ceci n'était que gémissements.
S'extirper du confort du nourrisson, le vrai travail d'une vie !

Nous ne sommes que
Ce que, d'instant en instant,
Dans un demi-sommeil,
La Situation,
Sans arrêt actualisée,
Réussi à nous motiver
D'Être.

J'aurais bien fini cette vie en légèreté, tellement vaporisé que je n'aurais même pas déclenché de battement d'aile, même du plus petit du plus petits des papillons.

Mais ta main s'est posée sur mon dos.
C'était énormément peu, une simple évidence ; j'étais, sans le savoir, déjà là.
Ta main a glissé sur mon dos et j'ai senti ma surface.
Parfois dangereuse, pour moi, pour les autres, souvent inutile, régulièrement inacceptable.
Mais là.

Alors, je plongerais cette surface, qui prétend prévaloir sur ce que je suis, ce que je pense et ce que je vaux, dans la foule. Comme dans l'acide. Et qu'il en sorte ce que voudra !

Je serais là, à 10h30, Place de la Victoire.

Pour dire que croissance, prospérité, ne doivent être que les justes conséquences de nos activités communes apaisées.
Et non pas le moteur premier de nos gestionnaires perdus, soumis aux seules entités qu'ils pensent contrôler : les chiffres.

Et pour être parmi vous.
Car tu m'as montré que j'étais déjà
Là.


15 mars 2016

Les étoiles ont besoin de notre amour

image : Jurik Peter

Les étoiles ont besoin de notre amour, vraiment. Je ne plaisante pas. Je ne poétise pas non plus.
Je me souviens de ce charmant garçon, à ses débuts. Il avait l'orgueil de la jeunesse, un je-ne-sais-quoi, aussi. Mais pas beaucoup plus que cet autre, dont on n'entendra jamais parler ; qu'on croise, au magasin, à l'usine ou au bureau, en se demandant où diable l'a-t-on vu, pour être ainsi, comme frappé par son aura ?
Lui, c'est sûr, voulait sortir du lot. Et, parmi tous les prétendants, il jouait des coudes, comme les autres. Un peu plus d'écoute pour ses pairs, un peu plus d'attention à l'air du temps, un peu plus de travail, c'est sûr, car certain ne se laissent pas le choix.  Et puis, beaucoup plus de chance, de concours de circonstances, de saisie d'opportunités.
Et le voilà, un pied dans le courant.
C'est là, sous la lumière, pour l'instant pale, qu'il apparut. C'est là que nous avons commencé à l'aimer.
Il savait l'effet que lui procurait cette reconnaissance. Sans vraiment se l'avouer. On lui parlait de don, de talent, il voulait bien y croire. Et, comme les océans se nourrissent de rivières, il rendait ce qu'on lui donnait. Tout ça gonflait, grondait, une avalanche d'amour qui grossissait à mesure qu'elle dévalait les années, phagocytant tout ce qui trainait sur son passage.
Ça donna une icône. Ça donna notre jouet, notre maitre. L'art est la dernière des religions à la mode. Nous avions bien essayé la science, mais, les scientifiques, avec leurs bombes, leurs centrales atomiques, merci, mais ça pouvait pas coller.
Les artistes, on les connait, c'est nous qui les fabriquons. On s'y met à plusieurs, on s'y met à tellement, des générations, que ça nous coute trois fois rien. Bon, certain ne sont pas raisonnables et donnent amour et argent avec pas mal d'inconscience, mais dans l'ensemble, nous ne crions, ni ne hurlons, à genoux dans l'arène, que ce sont nos Dieux, qu'une ou deux fois l'an, au pire.
Chacun dans l'illusion de contrôler l'autre. Sérieusement, ces Stars, ne le voient-elles pas, qu'on exagère pas mal l'amour qu'on leur porte ?
Lui, un jour, il l'a su, qu'il était loin de mériter ces élans inconsidérés.
Il l'a vite oublié.
Et la vie bat son plein.
Avec, parfois, quelques nuages sombres ; ces drames odieux, ces prises de positions incompréhensibles. Non, pas lui. C'est impossible... Il ne peut avoir autant de talent tout en étant capable du pire ?
L'écrivain de génie antisémite, le musicien de génie assassin, la star géniale qui n'aura vécu que pour des chimères. Quelque chose cloche.
On dira, pour une vie exceptionnelle, il faut des être hors normes, hors des normes.
On sait, pourtant, que c'est pour nous, qu'ils vont franchir toutes les limites. Pour aller chercher quelques réponses, nous ramener quelques beaux gibiers, qu'ils nettoieront du sang et de la boue, pour nous les offrir, étincelants.
Et nous, pour quelques euros, nous tiendrons ces précieux présents, bras levés vers les cieux, le cœur brulant d'espoir et de reconnaissance, dans l'attente d'une révélation, comme si une quelconque procuration était de mise pour ces questions ?
Finalement, chaque chose est sa place ; il y a ceux qui font tourner la machines et ceux qui lui donnent de l'allure.
Et l'amour, un carburant, qui mène où bon lui semble.

05 mars 2016

D'amour et d'aaaaaaaaahhh !

 Alte Ronningen
 Alte Ronningen - clic




LE MOT A PLACER EST : FARFADETS

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Quelle bande d'idiots, c'est pas croyable...

Si seulement c'était un sale rêve, que rien ne se soit passé, qu'ils ne soient pas tombés.

Que je n'ai pas à confesser l'horrible révélation ; que mes amis sont des abrutis.

Pourtant, ils le sont.

Et tout ça n'est que l'aboutissement d'une longue série de conneries. Dont la première ne fut pas des moindres ; se marier, après plus de dix ans de vie commune, tout ça pour une sombre histoire de couverture financière, d’exonération d’impôts. Sans inviter personne, bien entendu. Pas d'amis, pas de famille. Sauf moi ; judicieuse idée...

L'idée c'était de vivre d'amour et d'air pur, pour un week-end en altitude. Ils ont même failli se fâcher, quand j'ai tenté de corriger la maxime ; d'amour et d'eau fraiche, on dit, pas d'air pur.

- Mais c'est notre mariage, on fait ce qu'on veut !

Soit.
Donc, une falaise pour l'air pur. Et pour ce qui est de l'amour, je n'ai pas cherché à poser de questions...

J'ai beau essayer de me convaincre qu'ils l'ont bien cherché, à leur décharge, je dois bien avouer que j'ai un sens de l'humour assez catastrophique.

Bon Dieu, mais qu'est-ce qu'il m'a pris de leur faire la blague du photographe de montagne :

- Très bien, reculez un peu, encore.. presque... un dernier pas.

- Aaaaaaaah !

Non, c'était pas très malin. Je suis vraiment prêt à tout pour une bonne blague pourrie, incorrigible.

Et maintenant, je me retrouve tout seul, tout en haut de cet à pic qui me glace le sang ; j'avais réussi à maitriser ce vertige qui peut me saisir même du balcon de mon appartement, simplement au deuxième étage. Alors là...
C'est pour ça aussi que je déconnais. Faire peur aux autres pour masquer sa propre trouille, facile.

De toutes façons, c'était prévu qu'on saute.

Qu'est-ce que vous croyez, la bosse dans mon dos, c'est pas une déformation congénitale, ni le sac du gouter, encore moins une famille de farfadets à mon dos accrochés. Non, c'est un parachute.

Ils doivent me maudire, la photo est gâchée et on va devoir se retaper toute l'ascension.

Oops !

27 février 2016

Girl's Butt a Fly

Catherine Alexandre - clic et clic

 Atelier d'écriture Miletune

LE MOT A PLACER EST : SCENOGRAPHIE



Salut les amis,

juste un petit mot pour vous annoncer une grande nouvelle.
Voilà, vous savez toutes et tous que je fais de la musique depuis pas mal de temps. Et que, malgré tous vos encouragements et les efforts que je produisais jusque là, le milieu de la musique semblait n'avoir aucun espèce d’intérêt pour mes créations. Et bien, tout ça, c'est fini ; je sors mon premier album !
J'ai enfin fini par avoir la chance sans qui tous les talents restent cachés ; j'ai rencontré M. Morris, responsable du secteur divertissement d'un grand groupe spécialisé dans les hautes technologies (mais je ne peux vous dire lequel, rapport à une clause de confidentialité de mon contrat. M. Morris, comme son nom ne l'indique pas, ne fait pas des bédés de cowboy solitaire !)
Bref, je vous envoie la maquette pour la pochette de mon cédé, j'espère qu'elle vous plaira.
J'avoue que je ne maitrise pas grand chose mais, vu que tout me plait jusque là, je laisse faire le staff.
Et ils ont plein d'idées pour m'aider à faire de moi une vedette : la jaquette, le titre de l'album, les costumes, la scénographie de mes concerts, ils s’occupent de tout.
Je n'ai pas lu toutes les petites lignes de mon contrat, tellement je jubilais d'avoir été choisie, avant de signer. Il semble quand même qu'il y ait un article pour le moindre cas de figure qui puisse se produire entre moi, la production, la distribution, la création, la technique, les relations publiques, que sais-je !
Maintenant, toute ma vie est sous contrôle.
Mais je vais enfin vivre ma passion à fond.
Le reste, droit de regard, choix personnelles, liberté, je m'en fiche bien !
C'est d'ailleurs mon dernier courrier privé sans relecture de la part du service communication.
Enfin, j'espère qu'ils n'en saurons rien.
Car, la moindre infraction est un motif de rupture de contrat immédiat.
-> Faut vraiment que je m'attèle à sa lecture mais il est si épais...
Et puis, je sais que je ne suis que la partie visible de leur écurie d'artistes du secteur Musique Pop Romantique.
Une dizaine de fille tout aussi talentueuse que moi sont gardée "au frais", comme ils disent en riant.
Pour plusieurs raison :
  • Ne pas me faire d'ombre (leur contrat les lient elles aussi)
  • Ne pas multiplier tous les frais de production/distribution
  • Concentrer l'amour du public sur un seul artiste
  • Avoir une roue de secours si je leur claque entre les doigts (le facteur humain, ils disent)
C'est sûr que ça rigole pas trop, dans le monde du divertissement. Mais d'après eux, c'est partout pareil. Alors, à quoi bon faire la fine bouche, je vous le demande ?
Et puis, ma jaquette est trop belle avec tous ces papillons !
Je suis si heureuse,

xoxo à toutes et tous,

Valentine Butt

08 février 2016

Le Binôme

Ferdinand du Puigaudeau
Atelier Miletune - semaine 06/2016
LE MOT A PLACER EST : FAUNE



Nous étions deux, faites pour être deux, deux ou rien, programmées, évidentes. Pour toujours. Jamais l'une sans l'autre, complémentaires, fascinées. Tu étais l'artiste, imaginant des univers, des créatures, réelles ou pas. Et moi, de mon côté, j'apportais la technique, avide de matérialiser tes fantasmes, extravagants, envoûtants.
Fausses jumelles, pourquoi fausses ? Nous vivions l'une pour l'autre. Toi, tu laissais faire tes mains, uniquement concentrée sur la lumière que je t'apportais. Moi, je ne perdais pas une miette de tes ombres chinoises. Nous vivions chacune, l'une à travers l'autre, désintéressées de nous-mêmes. Ou plutôt, hypnotisées, devant ce miroir que nous étions l'une pour l'autre.
Pour Papa, d'ailleurs, nous n'avions qu'un prénom, le Binôme ; et c'était une vraie joie d'enfance, totale et chaleureuse, que de lui répondre :
    •    J'arrive !

Quand il hurlait aux pieds de l'escalier :
    •    Le Binôme, à table !


Le peu de précautions que nous mettions, pour protéger notre amour, nous valait souvent des jugements terribles. Mais nous en rions tellement, toutes les deux, le petit doigt dans la bouche, indue, de l'autre, en essayant de le prononcer, malgré l'oblong bâillon de chair, ce mot qui leur faisait horreur :
    •    Le tabou, c'est chou !

    •    Le tabou s'échoue !

    •    Il sèche où, le tabou ?

    •    Mon chou, t'es tabou !

Et nos rires étaient francs, éclatants, transparents, comme ce fin filet de salive, resté collé, à la commissure de nos lèvres. Nous étions insatiables, gourmandes à l'excès. Et il faut bien avouer que, les secrets, l'intimité, la pudeur et la honte, nous avons mis un temps fou pour enfin nous en préoccuper.
C'est en grandissant que nos papouilles commencèrent à vraiment nous jouer des tours. Et ça, toi, tu ne l'as jamais accepté. Ça te rendait folle de rage. Et, quand j'essayais de te parler de pardon, d'amour inconditionnel, fâchée, tu cherchais où les frapper.
    •    Tu sais, pour eux, nous sommes comme une douleur, une déchirure dans leurs certitudes, un Katerpilar dévastant les fragiles remparts qu'ils dressent face au néant.

    •    Des cons, sont tous des cons.

    •    Et nous, qui ne demandons qu'un peu de tolérance, n'en avons nous donc aucune pour eux ?

    •    Tu inverses le problème...

    •    Je veux dire que nous leur reprochons la même attitude que nous avons à leur égard.


Alors, tu es partie. Rejoindre la faune qui hantent les nuits de nos cités endormies.

    •    La faune ?

    •    Oui, c'est un peu fort. Mais c'est le mot à placer... Tu voulais pas que je parle de lapin, quand même ?
    •    Ceux que tu illuminais naguère, lors de nos premiers jeux nocturnes ?

    •    Ceux-là mêmes. C'est vrai qu'il n'ont pas duré longtemps... De vrais petits préliminaires !

    •    Oh, arrête, tu me tortures. Entre la nostalgie et l'envie, ma tête me fait un de ces mal au cœur...


Depuis ton départ, je parle toute seule, faisant questions et réponses, pareilles à celles qui te venaient sans cesse. J'ai compris qu'un amour qui a éclos, il a éclos à jamais. Nul ne pourra dire : « Ça ne fût » Si, ça fût ! Il est né avec nous, il  a vu le jour, c'est irrévocable. Et je suis le gardien de son souvenir. Et tant que je serai là, il me tiendra compagnie, le long du vide de mes journées grises ; me réchauffant un instant, quand le vent tourne au Nord.

    •    T'aurais pu faire un truc plus gai...

    •    Plus gay ? Difficile !

    •    Non, mais t'es trop conne, toi ! Je t'adore. Enfin, tu vois ce que je veux dire ?

    •    Du tout ! ... Ok, mais bon, c'est à cause du mot "faune" à placer, alors qu'on voit un animal sur l'image. Tu sais bien que si le mot décrit quelque chose qui est sur l'image, ce n'est plus une contrainte, mais une évidence. Je ne pourrais jamais me résoudre à la paraphrase.

    •    Je pense que tu n'utilises pas la bonne définition pour "paraphrase" ; c'est cool, la paraphrase. Google-moi celle-là, de Malherbe, sur le psaume CXLV, qui commence comme ça  :


« N’espérons plus, mon âme, aux promesses du monde ;
Sa lumière est un verre, et sa faveur une onde… »

Merci d'avoir été, mon amour.

03 janvier 2016

Caprice ?

 
Lucie de Barbuat - Simon de Brodbeck -


LE MOT DE LA SEMAINE 1(de l'atelier Mil et un) EST : CAPRICE


En ce dimanche 2 janvier, le réfrigérateur de Bartholomé, appartement 317, est complètement vide.
- Merde, le frigo est complètement vide...

Du pack de bière massif, qui aurait dû tenir jusqu'à demain, lundi, ne subsiste rien, hormis un très beau carton d'emballage orné, comme il se doit en cette saison festive, de motifs hivernaux nordiques.
- Et j'ai même plus de bières au frais, ni ailleurs, d'ailleurs...

L'heure est venu pour lui de se couvrir pour descendre en ville et se mettre en quête d'un commerce de proximité ne respectant pas la trêve dominicale.
- Bon, je vais pas y couper ; ça sent la socialisation et l’échange de devises...

Dites-moi, sans vouloir me mêler de ce qui ne me regarde pas ; je vois bien la tentative du procédé stylistique mais tout de même, avec toutes ces redondances informatives, n'avez pas peur de lasser le lecteur ?

Je me suis effectivement posé la question... Si vous avez une meilleure idée, je prends. Le problème étant qu'il s'agit de rendre l'histoire vivante avec intervention personnelle du héros. Mais j'ai aussi pas mal de trucs à dire qui vont nécessiter mon intervention directe.

En clair, vous ne savez pas trop où vous allez et, par une précaution bien compréhensible, vous souhaitez vous laisser le maximum de portes de sorties... ouvertes. 

Ah, je vois qu'on ne peut rien vous cacher ; c'est pas à vous qu'on peut la faire !

Vous êtes ivres ?

Pas du tout, désolé du quiproquo, je suis le narrateur ! Et vous ?

J'ai bien envie de vous répondre que ça ne vous regarde en rien mais, en ces temps de compassion fraternelle annuelle, je vais faire un effort ; vous pouvez m’appeler Éric, je suis le type qui écrit, ce qui, reconnaissez-le, ne vous avance en rien...

D'accord, merci pour l'info - quel caractère - bien, à propos d'avancer, je suis désolé de vous laisser un peu en plan mais j'ai une histoire à avancer et un héros qui commence à avoir soif, continuons.

C'est ça, continuez... Mais je persiste, vu le manque de légèreté du chemin qu'on prend actuellement ; ça m'est vraiment pénible d'être associé à ce fiasco...

Non, je vous assure, ça va bien se passer, si toute fois, bien entendu, chacun y met du sien ! Alors, reprenons ; mais pourquoi donc Bartholomé hésite-t-il à descendre les escaliers sur le champs ? Aurait-il peur que la petite fille, la sœur de Lolita, soit postée en surveillance, menaçant de ruiner sa tranquillité au moindre de ses mouvements ?

- Hé ! La pisseuse, tu vas pas me balancer à ta sœur, hein ?
- T'es pas gentil !
- Si. Mais tu peux pas le savoir, t'es trop petite.
- Je vais le dire à Lolita que tu te moques !
- Tu sais, vue d'ici, tu ressembles à un petit suppositoire tournant autour d'un gros trou marron caca.
- C'est pas vrai, vilain méchant, moi, je ressemble à un très joli Caprice des Dieux, moi, d'abord !
- Un caprice des dieux ...?
- Le fromage, gros nigaud tout bête. Tu vois pas que les carrés rouges et blanc du carrelage, c'est comme le papier qui entoure le fromage ?
- My fucking God mais WTF...? Oh...! Je vois, tu confonds le Caprice des Dieux avec le camembert Le Rustique. Toi alors, en plus d'avoir aucun palais, t'as vraiment aucune culture en consommation de masse !

Bien, j'arrête tout, parce que là, c'est plus possible de taper vos conneries. Nonobstant le fait que j'ai à peu près rien d'autre à faire, vous êtes dur, quand même. 

Écoutez, je supporte vos intrusions, moyennement agréables, je me permets de vous le faire remarquer, avec toute la retenue qui me caractérise, mais, c'est un peu fort de café. Vous n'avez pas le droit de m'empêcher de m'exprimer, que je sache ?

Alors, en fait, si ; j'ai un peu tous les droits, vu que c'est moi qui tiens le clavier.

Et vous, vous arrêtez tout, sur un coup de tête, sans même essayer de comprendre ?

Mais comprendre quoi, à la fin ? Vous avez une consigne des plus simple, placer le mot "caprice" en s'inspirant d'une photo où l'on voit une petite fille assise par terre et qui tient serré un nounours... On ne peut pas être plus clair que ça : c'est la petite fille qui fait un caprice, bordel ! Y'a pas besoin d'inventer des liens grotesques avec ce (délicieux) fromage à pâte moelleuse (mais sans vraiment de goût) qu'est le Caprice des Dieux, voyons !

C'est trop évident.

Trop évident ? Mais, c'est comme ça, point à la ligne.... Vous voulez participer, vous suivez les règles.

Je préfère suivre mes propres règles, si vous n'y voyez pas d'inconvénient ?

Vos propres règles ? Non mais quel toupet, quel orgueil, quelle prétention, quel casse pied (oui, j'ai été assez vulgaire comme ça !) Et ce sont quoi, ces prétendues règles ?

Y'en a un paquet, et ça, je le souhaite à personne, soyez en sûr, c'est pas tous les jours fêtes, je préfère prévenir. Mais bon, si vous y tenez, en voilà une : ne jamais se fier aux apparences et toujours chercher si il n'existe pas d'autres voix que celle, trop évidente, qui nous est fournie pré-digérée.

Je vois, nous sommes en pleine crise mystique... Et, par exemple, pour rigoler, de quelle autre évidence à scruter pouvez-vous nous gratifier ?

Les bises rien qu'aux filles, ça vous dit quoi ?

Tiens, c'est vrai qu'en y réfléchissant, je me rappelle en sixième, les premières poignées de main entre collègues de classe hommes, les premières bises aux collègues de classe filles, ça sentait un peu la discrimination. Mais bon, faut bien discriminer, pour s'y retrouver ?

Je vois... Discriminons... Et les poils sous les bras, sérieux ? C'est pas sérieux !

Les poils sous les bras ...? Ah ! Non, je maintiens, vous êtes saoul !

Bon, donnez-moi un seul argument, une seule loi scientifique (ou religieuse) pour valider cette impérieuse évidence qu'est la nécessité du rasage sous les bras.

L'hygiène n'a pas l'air d'être votre préoccupation première, à vous ?

Vous voulez dire que les hommes étant tous des porcs, on peut comprendre que des aisselles poilues soient de circonstance chez eux ?

Bha, je sais pas, l'esthétique alors ?

Vous savez qu'avec des théories pareilles, y'a moyen que ces dames finissent toutes chauves dans pas longtemps. Déjà que les poils pubiens sont en cours de disparition, ça va ressemble à quoi, la femme du futur, à un asticot ? 

Dites-moi, elles ont quand même un peu le droit de faire ce qu'elles veulent, les femmes,  de leur corps ?

Je n'ai jamais rien dit d'autre, merci ! Maintenant, la question qu'on peut se poser est :
Se pourrait-il que ce qui apparaisse au premier abord comme une évidence, c'est à dire que ma volonté n'appartienne qu'à moi, soit en fait issu d'un processus beaucoup plus complexe, fait d'influences, de partis pris, d'éducation, de préjugés etc... ?

Foutaises, elle est à moi, c'est ma volonté ! D'ailleurs, pour la peine, j'arrête d'écrire, là !
...

[caprice ?]